Comment expliquer cet exploit ?
En temps normal, lors d’une ovulation, l’un des deux ovaires de la femme expulse un ovule. Cet ovule sera ensuite entraîné dans la trompe de Fallope, lieu du déroulement de la fécondation. On appelle fécondation la rencontre entre un spermatozoïde et un ovule, mais ça vous le savez sans doute.
L’œuf ainsi fécondé doit parcourir un long trajet depuis la trompe jusqu’à la cavité utérine, où il trouvera les conditions nécessaires à son implantation et son bon développement. Dans 2% des cas, l’œuf se développe en dehors de la cavité utérine. Il s’implante au niveau de la trompe utérine dans la majorité des cas, plus rarement au niveau de l’ovaire, du col utérin ou encore dans l’abdomen.
À noter que le fœtus peut se retrouver dans la cavité abdominale, soit par implantation directe de l’œuf dans l’abdomen, soit par l’intermédiaire d’une brèche au niveau de la trompe utérine, de l’ovaire ou encore de l’utérus. Ainsi, l’œuf migre de la fistule et se retrouve dans l’abdomen, de là, il continuera sa croissance.
Il ne pourra généralement pas survivre bien longtemps au vu du manque de vascularisation nécessaire à son développement et sera expulsé par le corps de la mère. S’il n’y a pas expulsion du fœtus, c’est que ce dernier a trouvé un moyen d’échapper aux systèmes immunitaires de sa mère.
Le fœtus se convertit en sels de calcium insolubles et forme une sorte de coquille qui lui servira de membrane de protection. De ce fait, il devient indétectable et la mère ne ressent aucun symptôme dans la plupart des cas. On appelle ce phénomène « lithopédion ». Ce terme provient des mots grecs litho qui signifie « pierre » et de pedion qui signifie « enfant », il désigne un enfant pétrifié, un bébé fossilisé.
Maintenant, parlons de Zahara Boutaleb.
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Être en état de gestation durant 46 ans
Zahara Boutaleb, une Marocaine septuagénaire n’en pouvant plus de ces douleurs abdominales s’est rendue dans un CHU à Rabat. Arrivée là-bas, elle a rapidement été prise en charge par le personnel médical sur place. Et là, stupéfaction ! Les médecins ont remarqué une grosseur anormale au niveau de son abdomen et lui ont fait passer une radiographie.
Ils ont constaté après coup que la femme était en gestation depuis plus de 46 ans. Le bébé qu’elle avait porté durant était mort après être arrivé à terme et s’était calcifiée au fil du temps. C’était un fœtus de 42 centimètres, pesant 3,7 kg.
Par la suite, elle a subi une opération pour extraire « l’enfant » qui était en elle. Après cela, Zahara a connu une période de dépression. Pour la mère de famille, le fait qu’elle ne s’était même pas rendue compte que son enfant mourrait en elle l’avait traumatisée.
La femme avait précisé qu’elle avait des doutes sur une potentielle grossesse à l’époque. Elle s’était notamment rendue dans un hôpital local pour le confirmer mais les résultats n’avaient rien donné.
Il faut savoir que les tests de grossesse achetés en pharmacie ne sont généralement pas efficaces pour détecter les grossesses extra-utérines. Cela est dû au taux d’hormone de grossesse relativement plus faible par rapport à celle d’une grossesse normale. Aussi, les moyens d’exploration à l’époque n’étaient pas assez précis, ce qui a favorisé le risque du mauvais diagnostic.
Ce sont notamment les femmes issues des milieux défavorisés qui sont les plus souvent victimes de ce phénomène, faute de ressources nécessaires pour un suivi approprié. Celles qui souffrent de symptômes préfèrent endurer la douleur ou les calmer avec des antalgiques au lieu de dépenser de l’argent à l’hôpital. Ce n’est qu’en cas d’extrêmes souffrances qu’elles se résignent à y aller.
Extraordinaire mais pas unique
On a recensé plus de 300 cas de lithopedion à ce jour. Le cas le plus anciennement documenté est celui de « l’enfant pétrifié de sens ». En 1554, Colombe Chatri, une femme quadragénaire supposée être enceinte qui n’accoucha finalemment jamais. Elle est morte moins d’une trentaine d’années après.
Les médecins, curieux de savoir ce qui s’était vraiment passé, ont demandé une autorisation à son mari pour une autopsie. Ils ont découvert qu’elle portait un bébé fossilisé, conservé depuis 28 ans dans son utérus. Néanmoins, ce n’était pas la cause de sa mort. Elle a été emportée par la vieillesse.
On a retrouvé à peu près le même cas en 1674. Anna Muller a présenté une grossesse normale, elle a tous les signes – même les contractions, mais elle n’a pas accouché. L’enfant qu’elle portait en elle s’était calcifié progressivement et est devenu un bébé fossile.
Mais contrairement à Colombe Charti elle a pu encore tomber enceinte et donner naissance à 2 autres enfants, en bonne santé en plus, malgré la présence de l’enfant de pierre. Comme quoi le corps d’une femme est pleine de surprises.
Déjà que la grossesse est une période marquante pour la femme, on peut dire que dans ce genre de cas, notamment celui de Zahara, elle devient encore plus mémorable.