Présente en Méditerranée depuis plusieurs décennie, l’ostreopsis ovata, petite algue invisible à l’œil nu, fait l’objet d’une étroite surveillance. Il s’agit d’un organisme vivant particulièrement toxique, à l’origine de symptômes allant de la rhinite légère à des difficultés respiratoires sévères. Le plus grand risque serait une contamination massive, selon les spécialistes.
Des risques importants pour la santé
Luc Deharo, médecin du centre antipoison de Marseille étudie les risques liés à la présence de cette algue dans les eaux méditerranéennes.
« L’ostreopsis est arrivée dans les années 2000 sur les côtes italiennes », a indiqué le Dr Deharo.
En effet, l’ostreopsis évolue normalement dans les mers tropicales chaudes où ses prédateurs limitent naturellement sa prolifération. Et depuis qu’elle a migré en Méditerranée, la chaîne alimentaire est rompue. Si bien que l’algue microscopique se développe à très grande vitesse, occasionnant de véritables invasions, sous forme d’efflorescences ou bloom.
D’abord repéré sur les rives génoises, l’ostreopsis s’est propagée jusqu’en France. Notamment à Villefranche-sur-Mer, Nice, Toulon et Marseille. Le signalement de symptômes suspects chez quelques plongeurs ont alors permis d’identifier les effets toxiques de ce micro-organisme.
La palytoxine en cause
Ainsi, la surabondance d’ostreopsis présente des risques non négligeables pour la santé de l’homme. Pour cause, cette algue contient un poison puissant appelé palytoxine qui cause différents troubles.
« Elle pullulait et avait entraîné de nombreux problèmes de santé chez les riverains. Ils ont commencé à se plaindre de nez irrité, de yeux qui piquent, de fièvre éventuellement », a par exemple décrit Luc Deharo.
Selon le docteur, on a recensé les premières intoxications à Marseille en 2006. Ainsi, quatre plongeurs ayant exploré la zone de baignade du Frioul ont souffert de différents symptômes. Les consultations ont effectivement révélé qu’ils s’étaient aventurés trop près d’une efflorescence.
Luc Deharo de reconnaître que la contamination avait pris l’équipe médicale au dépourvu. « Au tout début, on ne savait pas trop comment gérer la chose. On ne savait pas à l’époque que les plongeurs étaient particulièrement concernés », a-t-il admis.
Plusieurs modes de contamination
Il faut savoir que l’ostreopsis élit domicile dans les berges rocheuses, riches en algues ou en herbe de posidonie, plutôt qu’au large des plages de sable. Ce qui augmente le risque pour les plongeurs.
Dans ce cas, le mode de contamination se fait par infiltration à travers le dispositif de respiration artificielle. Car lorsqu’on se sert d’un tuba, il n’est pas rare que de minuscules gouttelettes d’eau remontent jusqu’aux voies respiratoires. Or, les microparticules d’ostreopsis peuvent passer à travers, entraînant « de la difficulté à respirer ».
Et concernant les baigneurs, les modes de contamination courants sont le contact physique et l’inhalation (gouttelettes et embrun). Dans le premier cas, la palytoxine entraine des rougeurs cutanée et oculaires, ainsi que d’insupportables démangeaisons. Dans le second, elle engendre une sorte d’état grippal.
« S’il y a du vent, l’algue peut être transportée à travers ces gouttelettes. On s’intoxique en la respirant. Pour les signes, cela va du nez qui coule, à de la toux, de la fièvre et même des difficultés à respirer »
, a souligné le médecin marseillais.
Heureusement que des traitements simples permettent d’éliminer les symptômes. Luc Deharo explique en effet qu’il faut « des anti-inflammatoires, soigner la zone contaminée, traiter les gens qui ont des difficultés respiratoires comme une crise d’asthme. »
Anticiper les efflorescences pour écarter les dangers
Cela dit, il faut éviter à tout prix la contamination en masse. L’expérience de certains pays ayant montré qu’une telle situation peut vite devenir ingérable.
« Si vous avez à gérer 200 personnes, cela devient problématique. C’est ce qu’il s’est passé en Italie à plusieurs reprises, où les urgences de Gênes ont été complètement saturées. En Algérie aussi : les urgences d’Alger ont été totalement débordées par près de 600 personnes arrivées en même temps », s’est remémoré le Dr Deharo.
D’où la mise en place d’un système de détection des pullulations d’ostreopsis, via le réseau international Ramoge. Grâce à cette surveillance incluant des prélèvements périodiques et des observations, les autorités peuvent anticiper les blooms et prendre des mesures. Interdire l’accès aux bords de mer concernés, par exemple.
« Depuis quatre ans, plus aucun cas d’intoxication n’a été signalé sur notre littoral méditerranéen », s’est d’ailleurs félicité Luc Deharo.
Mise en garde au sujet des fruits de mer
Par ailleurs, Ramoge appel à la vigilance concernant la consommation de poissons et crustacés. L’ingestion d’ostreopsis constituant également une menace sanitaire.
« Il est recommandé aux personnes pratiquant la pêche de loisir d’éviscérer les poissons avant leur consommation (…) Ne pas consommer les coquillages oursins et crabes dans les zones sujettes à la prolifération d’ostreopsis »
, lit-on sur son site web.
Il est donc préférable de s’abstenir en cas de doute ! Et pour de plus amples informations, n’hésitez pas à appeler le centre antipoison de Marseille au 04 91 75 25 25.