Le 14 juillet dernier, le monde des médias a perdu l’une de ses figures les plus emblématiques : Thierry Ardisson s’est éteint à l’âge de 76 ans. Animateur, producteur, écrivain, il a durablement marqué l’histoire de la télévision française par son style tranchant, ses interviews provocatrices, et son éternelle allure d’“homme en noir”.
Ses émissions cultes comme Lunettes noires pour nuits blanches, Tout le monde en parle ou encore Salut les Terriens ! ont rythmé plusieurs décennies, mêlant célébrités et anonymes dans un ton souvent impertinent.
🎤 Une voix dissonante face aux hommages unanimes
Depuis l’annonce de sa perte, les témoignages d’admiration se sont multipliés. Plusieurs chaînes, dont France 2 et Paris Première, ont rapidement consacré des soirées spéciales pour saluer son héritage télévisuel.
Mais une voix a rompu ce consensus. Celle de Judith Godrèche, comédienne engagée et figure importante du mouvement #MeToo en France. Sur son compte Instagram, elle a exprimé un refus clair de participer aux hommages, et a choisi de raviver un souvenir amer.
🎬 Un épisode marquant : l’interview de 1992
L’actrice fait référence à une séquence survenue en 1992, lors de son passage dans l’émission Double Jeu. Dans cet extrait, Thierry Ardisson lui pose des questions particulièrement gênantes, à mi-chemin entre la provocation et l’humiliation.
L’animateur l’interroge d’un ton léger :
« Tu aimes les hommes mûrs ? »
Face à son silence et son rire nerveux, il enchaîne :
« Quand t’es partie de chez toi, c’était pour un vieux de 35 ans, non ? », avant de lui demander, sans détour :
« Tu ferais un film osé ? »
📲 Un rire qui gêne encore aujourd’hui
Judith Godrèche a partagé l’extrait sur Instagram, accompagné d’un message poignant :
« Combien de jeunes filles ont appris à éclater de rire pour ponctuer leur gêne, donner le change, se faire croire que tout va bien ? Ce rire dure longtemps, il me gêne aujourd’hui quand il apparaît. Il est encore là. J’apprends à le considérer comme un ami. »
Une prise de parole qui a profondément touché de nombreux internautes, relançant un débat sur les limites de l’humour, la responsabilité des médias et le rôle des femmes à la télévision à cette époque.
🧠 Une époque remise en question
En pleine réécriture du récit médiatique à travers le prisme des violences sexistes et des inégalités, Judith Godrèche interroge un héritage. Celui d’une télévision où l’impertinence flirtait parfois dangereusement avec la domination, et où certaines paroles, longtemps banalisées, résonnent aujourd’hui avec violence.
Alors que beaucoup saluent l’audace de Thierry Ardisson, Judith Godrèche invite à une relecture critique de ces années télé. Une démarche courageuse qui soulève une question essentielle :
Peut-on célébrer une figure publique sans passer sous silence ses zones d’ombre ?
